mardi, janvier 19, 2010

L'almanachronique du 19 janvier


Hello les blogos ! Ya pas l'feu au crack la blogose !

" Immobile...L'immobilité, ça dérange le siècle. C'est un peu le sourire de la vitesse, et ça sourit pas lerche, la vitesse, en ces temps."
Ainsi causait Léo Ferré dans Il n'y a plus rien, un texte inédit du siècle dernier.
Cette chronique parlera de lenteur.
L'existence est tourmentée. Elle se heurte à tout moment à de hauts murs qui la font rebondir comme une balle en caoutchouc. Comme le disait Leibniz de Leipzig: " L'homme doit agir le plus possible car il doit exister le plus possible, et l'existence est essentiellement action." ( Putain qu'ça fait du bien de citer Leibniz de Leipzig au p'tit matin ! Ache denti !)
Ploum Ploum !
L'action est l'essence même de l'homme. Très tôt, celui-ci se meut. A peine sorti du fruit des entrailles bénies, il s'agite et s'anime. Il tête, tâte, teste, tente, palpe, hume, expérimente et éprouve. Il pourrait continuer ainsi longtemps, abondamment, mais très vite il se scolarise. C'est alors qu'il étudie. Il apprend à lire, à compter, il s'instruit sur les mathématiques, la physique, la géographie, il bûche l'avènement du moteur à explosion, et potasse sans fin les lois de bon aloi. L'homme ainsi gavé est ensuite jeté en pâture dans la société idéale du travail. Il lui faut marner, abattre de la besogne et labourer son dur labeur en attendant, le coeur transi, son flouze crépusculaire. Et tout ce temps, il s'agite et s'agite encore. Il crépite pour un corps d'autrui, cherche son double ou son triple, se marie, divorce, cherche encore un joujou jouissif avec qui jouer, part en vacances plus loin qu'ici, court, s'envole, achète, consomme...voyelle.
Enfin, il meurt. Fin de l'histoire.
Or un jour, un homme, plus ordinaire que singulier, avant que celui-ci n'aille ad patres et moins mobile que d'habitude, s'arrête on ne sait pourquoi sur le bord d'un chemin. Il s'immobilise et suspend le temps. Il observe. Sa respiration se fait plus lente.
Un escargot passe. Il est pour ainsi dire, dans ce qu'il est convenu d'admettre, l'essence même de la lenteur. L'homme le contemple.
- T'as bien de la chance toi !
- Eh quoi ? Pourquoi dis-tu cela ?
- Ben tu prends ton temps. T'es pas pressé pour un sou ! C'est l'moins qu'on puisse dire !
- Et alors ? Qu'est-ce qui t'empêche d'en faire autant mon pote ?
- C'est qu'je bosse moi !
- Ah ouais, tu bosses ! Ah Ah ! J'avais oublié ce détail !
- Ce détail ! Ben mon vieux, on voit bien qu'c'est pas toi qui marne ! C'est qui faut bosser pour bouffer !
- Et moi ? Moi aussi j'bouffe ! Pas b'soin de marner comme tu dis !
- Et comment que j'fais pour me loger ?
- T'as qu'à faire comme moi ! Ma maison, c'est moi !
- Et mes vacances ?!? Hein ? C'est toi qui va m'les payer mes vacances peut-être ?
- Moi, chuis toujours en vacances ! Peinard et pépère !
- Oh merde ! T'y comprends rien ! De toute façon, t'es pas un homme !
- Ah ça ! J'm'en voudrais ! Toujours courir, toujours bosser ! Se plaindre de tout, du manque de ci, du manque de ça !
- Gnagnagni gnagnagna !
- Oh tu peux gnagnagniser si tu veux ! Mais j'ai raison non ? Depuis combien d'temps t'as pas pris ton temps ? Hein ?
- Ben euh...
- Alors ?
- Mon dernier congé, c'était pour l'enterrement de ma mère.
- J'vois l'genre ! Et alors ?
- J'ai chialé comme un môme !
- Pourquoi ?
- Ben à cause de ma mère ! Il est con lui !
- Non ! C'est parce que tu as pris l'temps de te laisser aller à une émotion !
- ...
- Prends ton temps mon petit ! Cool ! Le monde avec lenteur marche vers la sagesse ! Voltaire !
- Si c'est Voltaire alors...

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