L'almanachronique du 15 janvier

Hello les blogos ! Wasp Gling Blong la blogose !

Avez-vous du talent ? Qui sait si vous n'avez pas le don d'écrire ? Êtes-vous musicien ? N'avez-vous point une prédisposition naturelle à la peinture ? Avez-vous du génie ?
Il est une tendance, détestable orientation s'il en est et pour le moins actuelle, à privilégier et à cultiver chez tout un chacun un talent, dont on prétend qu'il fut trop longtemps en sommeil, si souvent médiocre et ordinaire pour ainsi dire, et qui ne demande qu'à être développé et perfectionné. Ainsi va le monde d'aujourd'hui. Tout le monde a du talent. Du moins le prétend-t-on. Et l'on voit fleurir, partout sur les étals de la culture populaire, des petites fabriques de littérature, des manuels d'initiation pour les nuls, des abrégés, des méthodes d'instruction prompte et autres précis pour béotiens assoiffés d'aptitude élémentaire. Tout le monde a du talent. Et nous sommes là pour le cultiver. La main est tendue et y'a plus qu'à !
D'ordinaire, je prône très souvent, auprès de tous ceux qui végètent sans mal, la possibilité qu'à l'homme de créer, et le plaisir qui en résulte. Plaisir absolu et fondamental. J'ai même pour habitude de citer à ce propos, les paroles de Louis Jouvet dans Entrée des artistes de Marc Allégret : " Mettre un peu d'art dans sa vie et un peu de vie dans son art ! ". Là est le propre de l'homme. L'art.
Certes. Mais l'art ne se limite pas aux arts. Du moins ceux qui sont répertoriés selon les modes d'expression de la beauté. Aujourd'hui au nombre de neuf, telles les muses. L'art est aussi, comme le précise le dictionnaire, l'ensemble des moyens, de procédés réglés qui tendent à une fin. Un métier, une discipline, une activité, un savoir-faire. N'est pas artiste ( musicien, peintre, sculpteur...) qui veut. Par contre, chacun peut enrichir et exercer telle aptitude, tel don, sans pour autant créer dans cette idée que l'on se fait de la création pure. Bien souvent jamais atteinte et illusoire.
Je respecte et vénère un Léonard De Vinci, un Mozart, un Jimmy Page, un Vialatte, un Calder, un Frank Llyod Wright; certes, mais j'honore tout autant, sinon plus et sans goguenardise, la maître-queue d'une blanquette de veau exquise, l'observateur passionné, tel Jean Pierre Otte, des amours volubiles des renards roux, le lecteur-passeur, la jardinière effrontée, le conteur hâbleur, l'exalté et collectionneur des musiciens de chez Stax Records, la fervente fondue de thé, le bouillonnant amateur de contrepèterie maladroite, le pilier de comptoir de droite et la turlutière voluptueuse.
En un mot comme en cent, laissez de côté les problèmes métaphysiques aux artistes qui s'la prennent, et, comme le disait Voltaire candide, cultivez votre jardin, vous n'en serez que plus heureux et passionnant.
Il n'y a rien de plus criminel que de faire croire à quelqu'un qu'il a un talent artistique.
Quitte à vomir, je préfère le faire après repas.
Noblesse oblige !